Du bivocalisme au trivocalisme en Twittérature collaborative

Avec le soutien de la  communauté twitterienne

L’une des forces de la collaboration facilitée par  les réseaux sociaux (qu’il s’agisse de Twitter ou de Facebook) m’apparaît  être la fusion des imaginaires collectifs et la mise en commun des talents de chacun. Ainsi, je reconnais  que je n’aurais jamais pu rédiger seule certains  textes  inspirés des contraintes de l’OuLiPo tels que Ludovic (alternance voyelle-consonne) et Évasion (sans hampe ni jambage) tant les exigences retenues étaient grandes. Même constat pour le twitteroman sans E Tourbillon dans la  foulée de la Disparition de Perec qui cautionnait à son insu et de  façon posthume  cette  idée réactivée et revisitée en raison de l’interactivité du Web 2.0.

Du monovocalisme au  bivocalisme

Jusqu’à présent, les défis oulipiens proposés ont  permis d’explorer en Twittérature collaborative  le monovocalisme en E (Effervescences) et  en A-I-O-U ainsi que le bivocalisme en A-E, I-E, O-E et U-E (Passages. Ivresse, Osmose, Murmures). De micro fictions narratives en ont découlé selon un mode participatif puisqu’une  vingtaine de twittérateurs   y ont collaboré sur une base spontanée et  volontaire en se rendant sur les #mots-clic sélectionnés de leur choix, mais désormais disparus depuis en raison  de l’impermanence twitterienne. Il m’apparaît opportun d’offrir ce genre d’alternatives apparentes, puisque si le principe exploratoire m’importe, les produits peuvent toutefois varier étant donné que le processus rédactionnel s’avère identique. Le monovocalisme en
E inspiré de Perec (Les Revenentes) m’apparaît encore à ce jour extrêmement poétique et Effervescences demeure l’un de mes textes collaboratifs préférés. Je reconnais  que les autres essais monovocaliques en A-I-O-U ont été plus difficiles à concevoir puisque la faible fréquence de ces  voyelles en français limite considérablement les possibilités d’énonciation. D’ailleurs,  chez les premiers Oulipiens les expériences tentées à cet égard ne sont pas  apparues autrement concluantes. Cependant, lorsqu’il  fut  question de bivocalisme en E-A, E-I, E-O et E-U, une certaine jouissance esthétique est survenue.  La  fluidité des textes en témoigne d’ailleurs éloquemment et l’expérience twittéraire a rempli ses promesses implicites. J’ai d’ailleurs tellement  aimé vivre cette expérience collaborative que j’ai voulu poursuivre l’expérience bivocalique en m’y essayant ensuite toute seule. Il  est certain que l’expérience à plusieurs permet d’instaurer une connivence, accompagnée de surprises, de relances et redirections  fort agréables à vivre dans un esprit ludique. Mais quand j’ai rédigé récemment ma première  nouvelle littéraire  oulipienne hors du cadre limité de Twitter (limite établie de 140 caractères) en préférant cette   fois  recourir à Facebook, je me suis appuyée sur mes propres contributions à un groupe d’écriture, celui de Lipoyes afin qu’un texte personnel en émerge, soit Entente passagère.

L’influence de @Strofka, encore et toujours

Voilà pourquoi je vous propose aujourd’hui trois nouveaux défis apparentés pour clore cette suite vocalique particulière en vous invitant à vivre collaborativement mais  surtout sous forme d’interactions narratives, des expériences en trivocalisme. Elles sont encore une fois  inspirées directement de travaux rédactionnels parallèles dans les groupes d’écriture initiés par  Strofka sur Facebook auxquels  je  collabore depuis juillet dernier avec un immense  bonheur. Alors qu’il s’agit dans ces groupes facebouquiens de commenter ou de réagir abondamment à des propositions visuelles, musicales ou textuelles, selon ses envies puisque les propositions offertes sont infiniment nombreuses et que certaines d’entre elles, selon les moments de participation, s’avèrent plus attirantes que d’autres, elles s’inscrivent dans un  mode  de discontinuité  favorable à l’expression personnelle ou dialogique, ce que je  vous propose aujourd’hui  s’inscrit davantage dans un mode de continuité discursive puisqu’il s’agit encore une fois d’une  histoire en chaîne où chacun doit poursuivre dans l’optique d’une cohérence narrative  en prenant  appui sur les tweets précédents. Je remercie encore une fois @Strofka pour ses initiatives lipogrammatiques dans LIPOLYS (sans I ni O) , dans LIPKAE (sans U ni O) et dans LIPKAO (sans A ni O). Je rappelle que la voyelle O de StrOfka a été supprimée systématiquement et déjà  cette omission du O à elle seule entrouve des horizons syntaxiques et lexicaux fabuleux en raison des  interdictions lexicales et des gymnastiques syntaxiques nécessitées. Le degré de difficulté s’accroît effectivement  si on lui adjoint une seconde voyelle interdite. Vous aurez  compris que le lipogramme est la face cachée et sous-jacente au trivocalisme puisque la centration peut cette fois porter sur les  voyelles à retenir plutôt que sur celles à  oublier.

Des défis collaboratifs à relever en trivocalisme

Vous voulez participer à ces projets axés sur la matérialité du langage afin d’en soupeser la valeur créatrice induite par les impossibilités du dire? Je vous invite à venir me rejoindre sous les mots-clics suivants #trivocAEI, #trivocAEU , #trivocEIU   à votre gré, selon  vos préférences et aussi  souvent  que vous le voulez. Il suffit d’intervenir une seule fois de façon  appropriée (en respectant scrupuleusement les contraintes linguistiques établies, c’est-à-dire les lettres retenues) pour  faire partie du collectif d’auteurs. Il  vous est possible de participer plusieurs fois  dans plus d’un texte, puisque cette diversité  est porteuse de préférences qui  ne manqueront pas de surgir.

Je me suis permis depuis quelques temps de publier en direct sur  le blogue Éclectico les textes en élaboration en y ajoutant, au fur et à mesure, les contributions de chacun amalgamées en un seul texte  collectif. De cette façon, au lieu de lire de bas en haut sur le fil de Twitter à l’endroit de  collecte des Tweets, il  est  avantageux pour les  personnes désireuses d’y collaborer de se référer parallèlement à l’avancement du texte produit. Pour diverses raisons, je restreins l’expérience à quelques jours d’affilée même si je reconnais qu’elle pourrait se poursuivre. Rien ne  vous empêche par ailleurs de la reproduire dans  vos milieux de vie auprès de vos élèves et de l’utiliser  vous-même à des fins d’écriture personnelle.

Pour  intervenir dans les récits en cours, il vous suffit donc d’inscrire à la fin de chacune de vos contributions le mot-clic approprié parmi ceux que vous trouverez ci-après. Étant donné que je  ne  pourrai pas accepter d’énoncés  non conformes, je vous saurais gré de vérifier deux  fois plutôt qu’une  si votre tweet comporte uniquement les voyelles sélectionnées.  En  effet, je reconnais qu’il est   difficile de  cibler les intrus, tant cette façon  d’écrire s’avère peu coutumière. Par ailleurs, je vous invite à consulter au besoin un dictionnaire de synonymes en ligne afin de pouvoir puiser allègrement dans les synonymes proposés des mots  correspondant  aux contraintes retenues lorsque  vous pensez à un mot qui ne peut être utilisé.

Voici  donc les titres que je  vous propose, de même que  des phrases inductrices qui permettent au départ de s’appuyer sur des matériaux langagiers  en vous incitant à construire  vos propres images mentales. Il s’agit maintenant d’inscrire vos tweets en continuité. Encore  une fois, ce sera un parcours heuristique, puisque l’on en ignore à l’avance les résultats.

(Sans O ni U) #trivocAEI : IMAGES L’image est à interpréter et génère des idées initialement imprévisibles. La pensée s’affine en périphérie, même si elle ne  dépend pas des pixels. Adam se disait cela en attendant sa bien-aimée.

(Sans O ni I) #trivocAEU : APERÇUS D’une humeur massacrante dans le feu de l’été, Clara s’échappe au crépuscule devant les passants médusés. Beauté rebelle, elle cherche avec  ardeur  à retracer le départ de Rufus en ressentant un mal étrange.

(Sans O ni A) #trivocEIU :   LIGNES  DE FUITE Puisque l’esprit est une réserve de chimères, rien  n’est inscrit définitivement  en cette durée devenue fugitive. En effet, l’univers réprime les rêveries et submerge le réel. L’intensité semble brûler les êtres en recherche de tendresse et il est difficile  de risquer de les perdre. Le temps est venu d’inverser le silence.

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