Vous savez sans doute que l’OuLiPo se situe au carrefour de la littérature et des mathématiques, et que ce groupe de recherche propose d’appliquer des règles précises pour générer de nouveaux textes ou intervenir dans les textes déjà existants afin d’en activer les potentialités latentes. C’est dans cette optique que je vous propose un nouveau jeu twittéraire, un okapi * qui amène à écrire autrement, à explorer une manière d’écrire qui semble facile, mais qui est loin de l’être.
Qu’est ce qu’un OKAPI ?
Ce peut être, j’en conviens, un mammifère ruminant sachant se camoufler, ressemblant à un zèbre, mais appartenant plutôt à la famille des girafes. C’est également le nom d’un magazine pour les jeunes, mais c’est avant tout le nom d’une célèbre contrainte oulipienne qui figure dans l’Atlas de littérature potentielle.**
Vers un texte zébré
De quoi s’agit-il plus précisément ? D’une contrainte linguistique pour stimuler la créativité qui interdit que deux lettres voyelles ou deux lettres consonnes se suivent. Elle consiste donc en un jeu constant d’alternance entre consonnes et voyelles. Cette alternance consonne-voyelle doit se vivre rigoureusement à l’intérieur des mots, entre les mots et même idéalement entre les phrases. Dans le célèbre Atlas de littérature potentielle, le texte qui suit est donné en exemple : « La divinité s’amuse de ta timide habitude de rêver une petite minute, de-ci, de-là, sur une lame marine. L’alizé te ramènera du pâle horizon à la sévérité de ce rivage coloré: salut, ami revenu » (p. 264). Vous voyez que c’est chose textuellement possible.
Il y a quelques semaines, avec @Strofka, on avait décidé de relever ce défi oulipien, à coups de trois mots à la fois, dans le cadre d’une 3WS***, ce qui avait donné ce bien court texte : « Son ami refusa de jeter à mesure sur une rive son orage dévolu. Son opus imagé le dévitalisa. À la fin, il étala le pire de sa pose : sa vie. »
On trouve ainsi, dans ce qui précède, le respect du jeu d’alternance consonne (C) et voyelle (V) : Son = C-V-C , ami = V-C-V, refusa = C-V-C-V-C-V, de = C-V, jeter = C-V-C-V-C, à = V, mesure= C-V-C-V-C-V, sur = C-V-C, une = V-C-V, rive = C-V-C-V, son = C-V-C, orage = V-C-V-C-V-C-V, dévolu = C-V-C-V-C-V. Inutile de poursuivre, car c’est certainement devenu très clair.
Puisque je vous invite à une expérience d’écriture collaborative sur la plateforme de microblogage qu’est Twitter, chaque nouveau tweet pourra cependant commencer indifféremment par une lettre consonne ou une lettre voyelle afin d’instaurer une nouvelle séquence rattachée en continuité aux précédentes. En raison de l’écriture asynchrone et de ses répercussions sur la faisabilité, cet assouplissement m’apparaît souhaitable.
Comme pour les autres coproductions twitteriennes d’inspiration oulipienne figurant dans la rubrique des Écrits collectifs de ce blogue, il s’agira d’une histoire en chaîne nécessitant la prise en compte des tweets précédents. Je vous invite donc à poursuivre l’histoire amorcée ci-après au gré de votre fantaisie. Dans ce contexte, je me permets de rappeler qu’ il n’est pas nécessaire de produire un twoosh (tweet parfait de 140 caractères pile-poil), mais si vous désirez excéder la balise du 140 caractères, il vous est suggéré d’en produire au moins deux d’affilée. Où l’histoire nous mènera-t-elle ? Je l’ignore tout autant que vous… et cela fait aussi partie du jeu que de consentir à un dévoilement progressif et inattendu.
Pour cette nouvelle expérience de twittérature collaborative, je vous donne rendez-vous au mot-clic #tweetokapi. Déjà, on a un début d’histoire zébrée, qu’adviendra-t-il ensuite ? À vous de le décider…
Mobilisé par une colère banale, Ludovic imagine sa muse se dérober avec animosité.#tweetokapi
La vitalité d’un avenir avec Adèle ravive la démesure du désir inutile.#tweetokapi
L’original et infini remodelage de ce samedi dénaturé l’agite, le met à mal.#tweetokapi
LUDOVIC
Mobilisé par une colère banale, Ludovic imagine sa muse se dérober avec animosité. La vitalité d’un avenir avec Adèle ravive la démesure du désir inutile. L’original et infini remodelage de ce samedi dénaturé l’agite, le met à mal. (…) |
Merci pour ce nouveau défi, qui me parait plus compliqué que le celui basé sur la contrainte du prisonnier, mais d’autant plus intéressant ! Vous me compterez parmi les contributeurs !
Belle initiative, bravo !